lundi 21 février 2011

Essai de typologie de la droite québécoise

Selon le dictionnaire Trésor de la langue française, la typologie est la science de l'analyse et de la description des formes typiques d'une réalité complexe, permettant la classification.

Il serait fort prétentieux de ma part de qualifier ce billet de scientifique. Il est tout simplement le fruit des mes observations partielles et partiales.


Cela énoncé, comme le chantait Plume Latraverse : «On est ben ouvert a vos commentaire si vous payez l'cognac gnac gnac. Si vous payez éééééééé l'cognac. »

Commençons par la droite que je trouve le plus sympathique.


La droite idéologique


Les gens qui s'en réclament se nomment eux-mêmes libertariens, anarcho-capitalistes et parfois minarchistes. Je leur laisse la parole : « nous croyons que la liberté individuelle est la valeur fondamentale qui doit sous-tendre les rapports sociaux, les échanges économiques et le système politique. Nous croyons que la coopération volontaire entre les individus dans un marché libre est préférable à la coercition exercée par l'État. Nous croyons que le rôle de l'État n'est pas de poursuivre des objectifs au nom de la collectivité – comme redistribuer la richesse, « promouvoir » la culture, « soutenir » le secteur agricole, ou « aider » la petite entreprise – mais bien de se limiter à protéger les droits individuels et laisser les citoyens poursuivre leurs propres objectifs de façon libre et responsable. » Le Québécois libre – http://www.quebecoislibre.org/philo1.htm.


Ou sur le site Le Minarchiste Québécois : « "L’État, c’est la grande fiction à travers laquelle tout le monde s’efforce de vivre aux dépens de tout le monde." – Frédéric Bastiat » - http://www.minarchisteqc.blogdns.com/.


Résolument contre l'interventionnisme étatique, ennemis jurés des services publics, de l'impôt sur le revenu et des taxes, fervents défenseurs d'une certaine conception de la liberté et de la propriété privée, ils font souvent preuve de rigueur intellectuelle.


Pour les définir en quelques mots : libre marché et libre concurrence, défense des droits individuels incluant en premier lieu la propriété privée, responsabilité individuelle et non intervention sinon interventions minimales de l'État.


Même si la réduction des inégalités est loin d'être leur objectif principal, il ne faut pas croire qu'ils cautionnent pour autant l'accumulation de la richesse par un petit groupe et la paupérisation d'une vaste majorité. Ils croient sincèrement et honnêtement que tout le monde s'en porterait mieux en l'absence d'intervention de l'État dans un marché totalement libre. Et ils sont prêts à tolérer une certaine inégalité pourvu qu'elle repose sur les talents des individus ou sur leur effort personnel.


En général, ils font preuve d'une grande cohérence dans leurs discours. Ainsi, ils dénoncent catégoriquement l'investissement gouvernemental de 400 millions dans un amphithéâtre à Québec.


La droite pragmatique


Une seule règle les définit : le maximum de profit pour eux-même et leurs partenaires. Ils sont capables de récupérer tout le vocabulaire et tous les concepts de la droite idéologique ; tant que cela sert leur unique règle : faire des profits.


Leur vocabulaire préféré : dérèglementation, flexibilité et souplesse de la main d'œuvre, libre entreprise, compétitivité, privatisation, etc.


Leur grand rêve : privatiser les profits, socialiser les pertes.


Ils sont pour la libre concurrence à condition d'en sortir gagnants. Sinon, ils sont prêts à enfreindre les règles quitte parfois à entrer dans l'illégalité. Ils sont pour la libre circulation des biens et des capitaux tant que cela leur rapporte. Ils sont également pour la libre circulation des personnes à condition que cela soit en Mercédes. Ils sont pour la protection de l'environnement lorsque cela représente une occasion d'affaire. Sinon, que les autres s'en occupent. Ils n'ont rien contre l'impôt sur le revenu et les taxes à condition qu'on leur offre les moyens d'y échapper. Après tout, il faut bien que quelqu'un paie pour la formation de la main d'œuvre et pour les infrastructures publiques qui profitent à l'entreprise privée.


Ils aimeraient bien être honnêtes. C'est pourquoi ils sont pour la dérèglementation. Car contourner les règles, c'est pas "beau". Il vaut mieux les faire disparaître quand elles constituent un obstacle à la règle première : faire des profits.


La droite politique


Elle est au service de la droite pragmatique. Bien sûr, elle ne se présente pas de cette façon. Après tout, en démocratie, il faut bien se faire élire. Alors, il vaut mieux peaufiner son discours. Ils prônent une politique au service du développement économique et de la création de la richesse. Ils essaient de maintenir l'apparence d'un certain équilibre entre le bien commun et les intérêts de leurs amis et bailleurs de fond.


Le champ de l'économie est leur domaine de prédilection : compétitivité, création d'emploi, prospérité économique, rentabilité des entreprises, efficacité et efficience des services publics, etc.


Bien sûr, comment être contre la prospérité économique et la rentabilité de nos entreprises. Mais à quel moment une entreprise est-elle assez rentable aux yeux d'une droite assoiffée de profits ? Quand est-elle assez rentable pour assurer les salaires faramineux de ses PDG, de leurs « stocks options » et de leurs parachutes dorés ? À quel moment les gros actionnaires disent que le niveau de profit sur leurs investissements est suffisant ?


Cette droite politique qui vient au secours des institutions financières quand elles sont en péril et qui subventionne l'entreprise privée est dénoncée par la droite idéologique. Pour les libertariens, Jean Charest est encore un interventionniste, donc quelqu'un de gauche... Ils demeurent ambivalents face à l'ADQ, pas toujours assez à droite à leur goût.


La droite religieuse


Le Tea Party et Sarah Palin aux États-Unis sont de bons exemples de cette droite religieuse. Plus prêt de nous, le maire du Saguenay ne laisse pas sa place.

Je vous cite quelques unes des perles du mémoire de la ville de Saguenay à la commission Bouchard-Taylor:


« Nous nous définissons comme des croyants pratiquants. Pour nous, le fait que le Dieu du ciel et de la terre ait jadis osé faire alliance avec l’homme et la femme n’est pas une fiction, mais fait partie de nos convictions les plus profondes comme croyants et citoyens. » page 21


« C’est ce qui explique d’ailleurs que l’âme collective québécoise soit imprégnée du lien entre culture et foi. » page 24


« Cette identité culturelle religieuse catholique remonte au début de notre histoire. » page 25


« La révolution tranquille a amorcé en même temps une dérive morale. Comme un balancier qui ne sait plus s’arrêter, il faudra un jour revenir à l’équilibre. » page 26


Le maire de Saguenay a beau écrire à la fin de son mémoire : « Il ne faut pas y voir là un retour nostalgique vers le passé, mais un regard radicalement tourné vers l’avenir. » (page 87). Comment ne pas voir dans son discours un retour à la « belle époque » de Maurice Duplessis ou de Camil Samson.


La droite du ressentiment


Des victimes, que des victimes. De quoi ? Du féminisme, des syndicats, de l'ancienneté, de la reconnaissance des droits des homosexuels, de la protection de l'environnement, des immigrants, des musulmans, des baby-boomers, etc.


Par exemple, un commentaire d'un blogeur sur Duhaime en droite ligne : « N’oublions pas, pour ceux qui l’ignorent, qu’Alain Gravel de l’émission Enquête est un ancien président de la fédération des journalistes du Québec ( FDJQ ), ainsi qu’Anne-Marie Dussault qui anime 24 heures en 60 minutes… Radio-Canada est rempli d’anciens chefs syndicaux, de vieux Boomers gauchistes-syndicalistes, qui d’ailleurs, comme dans les cas de Simon Durivage ( qui anime le club des EX ), et de Daniel Lessard ( qui anime l’émission : les coulisses du pouvoir ), tardent à laisser leur place aux plus jeunes générations… » http://blogues.canoe.ca/ericduhaime/politique-partisane/bq/a-la-gauche-de-duceppe/#comments.


De victimes à bourreaux, il n'y a qu'un pas que la droite du ressentiment a tôt fait de franchir.


Un exemple : sur Radio Ego, le titre d'un extrait avec Jeff Filion : «Fermez vos gueules les importés » http://www.radioego.com/ego/listen/6877.


Sans commentaire.


Leurs armes de prédilection sont l'injure, l'insulte et la dérision : moumounes, syndicaleux, féminisés, collectivistes, vieux boomers, etc.


Le vocabulaire des masculinistes, entre autres, est une vrai mine d'injures et de néologismes à l'égard des féministes : féminazisme, fémisexisme, vaginocrate, histérocentrique, etc. (cf. « Cyberviolence : le discours masculiniste sur les femmes », Mathieu Jobin, dans Le mouvement masculiniste au Québec, sous la direction de Mélissa Blais et de Francis Dupuis-Déri, les éditions du remue-ménage, 2008, page 120.

Bref un discours souvent haineux et pas terriblement articulé.


Bon, je m'arrête ici. J'ai comme une nausée... quelque chose que j'ai mangé ? Que j'ai lu peut-être ?




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